Le CNPA vient de saluer les nombre historique d’élèves en apprentissage : +16% en 2019, pour un total national inédit de 485 000 jeunes en formation. L’apprentissage est-il -enfin- en train de s’extraire de son aussi vilaine qu’injuste image tellement française ?

Près de 13 000 postes de mécaniciens, carrossiers et peintres seraient actuellement désespérément vacants en France, calculait récemment une enseigne multimarque nationale. Et ce, alors même que l’ensemble de la filière des services a besoin chaque année de 50 000 nouveaux talents, comme vient de le rappeler la 5ème semaine en cours des Services de l’Automobile et de la Mobilité.

Il suffit d’ailleurs de voir avec quelle détermination les diverses enseignes du secteur communiquent et mettent en scène leurs besoins et leurs politiques de recrutement pour comprendre à quel point cette problématique est cruciale. A elle seule, l’enseigne Norauto vient d’annoncer avoir besoin d’accueillir 2 000 nouveaux collaborateurs en 2020 et déploie un vaste plan de sensibilisation dans toute la France pour y parvenir.

Sous-considération

Les raisons profondes de cette carence de talents sont bien sûr connues. Il faut pallier un manque endémique dont les principales causes demeurent l’attractivité du secteur, tout aussi modérée que ses rémunérations. Un handicap de fait pour de nombreuses entreprises d’entretien-réparation qui se voient de plus en plus freinées dans leur développement par cette pénurie de collaborateurs, plus souvent d’ailleurs que par l’hyper-concurrence croissante d’un marché structurellement en recul.

La sous-considération toute française de l’apprentissage a fait le reste. Une filière trop généralement considérée comme la voiture-balai de l’éducation nationale, voire un cul-de-sac infernalement dantesque où, une fois entré, il faudrait abandonner toute espérance en une carrière digne. Le contre-exemple allemand montre pourtant depuis longtemps qu’il ne devrait pas y avoir de fatalité. Et encore moins de jugements de valeur : de l’autre côté du Rhin, on croise souvent des P-dg de grands groupes ayant débuté leurs brillantes trajectoires professionnelles par un statut d’apprenti…

A qui le mérite ?

Le temps de la réhabilitation de l’apprentissage est-il venu ? Sans mauvais jeux de mots, quitte-t-il enfin sa voie de garage pour s’anoblir voie royale ? Le CNPA en semble presque convaincu, se félicitant des chiffres annoncés en conférence de presse par la ministre Muriel Pénicaud, toute à sa sanctification de la réforme gouvernementale de l’apprentissage entreprise en 2018. Une progression de 16% en 2019 vient de porter le total d’apprentis en France au record historique de 485 000 jeunes en formation.

Avec une souplesse de toréador, Le CNPA esquive pour l’occasion la vaste polémique que cette annonce ministérielle a suscité dans les régions, historiquement très impliquées dans la formation professionnelle. Des régions qui accusent pourtant urbi et orbi M. Pénicaud d’un opportunisme s’appropriant le résultats de leurs longs efforts à des fins de basse politique immédiate. Le CNPA se fait donc consensuel en accueillant «avec satisfaction la mesure proposée par la ministre de rendre amortissables toutes les dépenses de formations liées à des investissements corporels ou incorporels».

Mais il est somme toute logique que le CNPA enjambe adroitement toute querelle. La réforme a confié l’apprentissage aux branches professionnelles qu’il incarne très majoritairement, branches pour qui il s’agit autant d’un carburant que d’un compétence légitime. Qui en effet mieux qu’un pro peut former des pros ? Et qui mieux que la responsabilité des formations peut assoir la représentativité comme les ressources d’une instance fédératrice ?

Les longs efforts du secteur

En passant, l’organisation professionnelle n’omet toutefois pas de souligner à son tour qu’il faut rendre cette belle moisson de chiffres à un autre besogneux semeur issu de sa famille professionnelle : «le secteur des services de l’automobile affiche depuis des années une évolution constante et durable du nombre de contrats en alternance, en particulier de l’apprentissage», souligne le communiqué du CNPA. Il remonte donc à 2018 lui aussi, mais pour rappeler que déjà, dans la seule filière des services de l’automobile :

  • «l’alternance [représentait] près de 50% des effectifs de formation ;
  • 62 600 jeunes formés dans les spécialités automobile, dont 28 000 en apprentissage ;
  • les effectifs en formation en alternance ont augmenté de 9% ;
  • 72% des apprentis [se] sont insérés 7 mois après la fin de leur formation, après un contrat d’apprentissage ;
  • le Certificat de Qualification Professionnelle (CQP) [cosntitue] le meilleur dispositif de formation pour l’insertion : 91% des apprentis sont insérés après un CQP.»

Source : Après-vente Auto